Baumann a toujours dessiné, et nourri dès sa
prime enfance la certitude de son destin de peintre.
Dans son atelier, quelques visages au fusain, des
paysages à l'huile montrent qu'à treize ans, il maîtrisait
spontanément les techniques les plus solides.
Sa formation aux Arts Décoratifs de 1939 à 1945
lui a permis de traverser toutes les disciplines
pratiquées en arts plastiques, et son métier de sérigraphe l'a
confirmé comme paticien, et mûri dans son choix de
consacrer sa vie personnelle à la peinture.
Le grand succès de ses tapisseries, dès 1945, dont
plusieurs oeuvres souvent exposées ont été réalisées
aux Gobelins et à Aubusson, quelques tentatives en
sculpture, de superbes catalogues de photographies
d'art ne l'on jamais arraché à la nécessité intérieure
d'une recherche picturale dont la longue histoire se
trouve racontée ici dans deux de ses épisodes significatifs.
L'oeuvre de Baumann a traversé les mouvements
artistiques de notre époque: classicisme, fauvisme,
constructivisme, rêveries, déconstruction de
l'espace..., non point en suiveur de mode, mais selon une
démarche personnelle, dans un engagement qui a
souvent préludé l'affirmation de ses tendances. Sa quête
avait pour fin de faire éprouver sans obstacle figuratif,
le miracle subtil de la lumière. Sa recherche d'un
rendu de plus en plus économe de la forme lui a permis
d'affiner sa palette, d'expérimenter des matériaux
d'expression, de gagner une liberté d'analyse du
monde sensible qui le révèle insensiblement plus indifférent
au thème particulier de son travail, mais toujours
tendu vers une même démarche dont est perceptible
l'enjeu spirituel.
Baumann veut simplifier, purifier, épurer,
supprimer tout ce qui pourrait être seulement joli, théatral ou
clinquant, pour exprimer ce que la vie est
profondement, de telle manière que "le témoignage peint soit
semblable à un chant fort, puissant, assez rude, plein
d'une lumière-amour" qui donne sa fraîcheur intense et
subtilement inspirée à son oeuvre.
On peut reconnaître dans la rencontre des oeuvres
de Baumann la recherche flamboyante qui le conduit
à exprimer plus justement la lumière, en coloriste
des transparences, dans son souci de tracer l'intime
beauté des vibrations de la matière.
"Le domaine de la couleur, dit-il, est parallèle à
celui de l'amour". On peut y atteindre au surgissement
intact de l'essence-même de l'être, et y connaître le
ravissement aux franges du non-dit.
Dans le choix ingénieux des toiles, on découvre
par cette exposition l'affirmation humble et puissante
du pouvoir d'une oeuvre peinte. D'un côté, on
chemine de la généreuse violence des oranges et des ocres
bruns à l'affinement des beiges et des gris rosés. De
l'autre, le travail des matières supplée à la dynamique des
allusions formelles, et crée des espaces nouveaux,
des profondeurs qui signent un vertige.
E.ANDRES
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